Le salaire minimum conventionnel - DLT AVOCAT

Salaire minimum conventionnel : tout savoir

• Par Rebecca DE LA TORRE, Avocat en droit social / droit du travail

• Date de mise à jour : 28 août 2023

Le salaire minimum conventionnel est le salaire minimum prévu par une Convention collective de branche, issu d'une "grille de classification", applicable à un salarié.

Il existe en droit du travail français un principe de liberté de la fixation du salaire :

"la fixation des rémunérations salariales, ainsi que leurs accessoires de toute nature, relève de contrats librement passés entre employeur et salarié"
Décision n° 63-5 FNR du Conseil constitutionnel du 11 juin 1963

Selon ce principe, l'employeur et le salarié sont libres de négocier le salaire comme ils l'entendent.

En réalité, ce principe souffre de plusieurs exceptions dont notamment la nécessité de respecter des rémunérations minimales.

Ces minimums peuvent être prévus :

  • Par la loi. C'est le cas du salaire minimum de croissance ou SMIC (anciennement "SMIG" ou salaire minimum interprofessionnel garanti).
  • Par des conventions collectives. Il s'agit des salaires minimums conventionnels, moins connus des salariés, mais dont le respect s'impose tout autant à l'employeur.

1. Qu'est-ce que le salaire minimum conventionnel?

Définition du salaire minimum conventionnel

Les partenaires sociaux (représentants des syndicats d'employeurs et de salariés) établissent des barèmes de salaires minimums dans les conventions collectives.

L'employeur doit respecter le minimum légal (le SMIC) mais également les minimums conventionnels puisqu'il est tenu à une obligation de rémunération. En effet, le contrat de travail est un contrat synallagmatique : le salarié effectue une prestation de travail en échange d'un salaire.

À défaut de respecter ce minimum conventionnel, l'employeur s'expose à une action en justice du salarié qui pourrait demander, devant le Conseil de prud'hommes, des rappels de salaires.

Le salaire minimum conventionnel n'est pas nécessairement plus élevé que le SMIC, faute pour les partenaires sociaux de réviser régulièrement le texte conventionnel applicable.

Description des grilles de classification

Pour connaître le salaire minimum conventionnel applicable à un salarié, il faut regarder les grilles de classifications prévues par la convention collective applicable.

Ces grilles sont généralement constituées de la manière suivante :

  • Une première colonne mentionne le nom du métier ou du poste (sous forme de groupe ou de niveau) ;
  • Une deuxième colonne décrit les tâches et les compétences liées au poste en question (sous forme d'échelon);
  • Une troisième colonne prévoit la rémunération applicable à la classification en question.

Convention collective nationale de la restauration rapide du 18 mars 1988 - Exemple de classification - Salaire minimum conventionnel

2. Vérifier le salaire minimum conventionnel applicable étape par étape

Nous allons prendre un exemple pour comprendre concrètement comment déterminer le salaire minimum conventionnel applicable en distinguant minutieusement les étapes.

Étape n°1 : Déterminez la convention collective applicable dans l'entreprise et votre niveau de classification

S'agissant d'un salaire minimum conventionnel, il est logique de déterminer, en premier lieu, la Convention collective applicable à votre situation.

Vous pouvez retrouver cette information sur votre fiche de paie ou dans votre contrat de travail. Si vous êtes en contrat à durée déterminée, l'intitulé de la Convention collective applicable doit obligatoirement figurer dans votre contrat.

Regardez votre fiche de paie :

À  ce stade, vous pouvez noter :

  • La Convention collective applicable (généralement en haut de la Fiche de paie mais, comme sur cet exemple, il arrive qu'elle soit mentionnée en bas). Ici, il s'agit de la Convention collective "Hôtels, Cafés, Restaurants".
  • Votre type d'emploi. Il s'agit, dans notre exemple, d'un cuisinier.
  • Votre qualification. Cet élément est très important car le salaire minimum conventionnel dépend généralement de votre statut cadre / non cadre.
  • Votre classification au sein d'un groupe. Ici, il s'agit du niveau 1, échelon 1.

Étape n° 2 : Cherchez le salaire minimum conventionnel correspondant à votre classification au sein de la Convention collective applicable

Recherchez dans "Google" la Convention collective et ouvrez le site "Légifrance"

Sur le côté gauche de la page, vous verrez tous les textes conventionnels constituant la Convention collective. Recherchez le texte sur les salaires minimums conventionnels.

Vous pouvez aussi faire défiler les textes conventionnels sur la partie du milieu. Les textes relatifs au salaire minimum conventionnel sont généralement placés en bas. Choisissez bien le texte le plus récent (car les salaires sont réévalués fréquemment pour tenir compte notamment de l'inflation).

Ouvrez le texte et vérifiez bien le champ d'application pour être certain que vous relevez bien des salaires minimums conventionnels qui y sont mentionnés. Ici, le texte concerne "tous les salariés" mais parfois il se peut qu'il ne concerne que les cadres ou les non cadres.

Recherchez ensuite le salaire qui correspond à votre échelon et le tour est joué !

Voir le texte de la convention collective sur les salaires minimums conventionnels en cliquant ici. 

Ici, le texte conventionnel donne les rémunérations horaires brutes. Pour 35 heures de travail hebdomadaire ce montant correspond à un montant de 1 513,66 euros bruts (il faut multiplier par 151,67 heures).
Attention, toutefois, car dans ce cas précis, le texte conventionnel prévoit un taux horaire plus faible que celui du SMIC qui est de 10,15 € en 2020 soit 1 539,42 €.
Or, le montant le plus favorable des deux minimums doit s'appliquer, soit dans notre cas, le montant du SMIC.

Conseils : soyez patient dans la recherche de votre salaire minimum conventionnel et prenez le temps de bien lire les textes et de vous habituer à l'utilisation de Légifrance. Certaines conventions collectives sont plus complexes que d'autres. Et faites attention à ne pas vous tromper de classification (si vous êtes non cadre et que vous regardez dans la catégorie cadre dans certaines conventions par exemple). 

La classification mentionnée dans ma fiche de paie ou dans mon contrat de travail ne correspond pas aux fonctions que j'exerce réellement

Un salarié peut toujours engager une action en "reclassification conventionnelle" pour demander à bénéficier d'une classification conventionnelle supérieure.
Quatre fondements sont envisageables pour être "reclassé" dans une classification supérieure :

  • La voie classique : apporter la preuve que, dans les faits, vous exercez bien les fonctions (et tous les autres critères) visées par la Convention collective pour la classification dont vous estimez relever.
  • La voie du "surclassement volontaire" : dans certains cas, même si vous ne remplissez pas les critères prévus par la Convention collective pour une classification en particulier, vous pouvez prouver que l'employeur vous a volontairement "surclassé". Par exemple, si l'employeur a mentionné expressément dans votre contrat de travail une classification supérieure à celle que vous occupez dans les faits.
  • La voie de l'égalité de traitement : la référence au principe d’égalité de traitement est de nature à permettre à un salarié d’obtenir une classification d’un niveau supérieur. Si les éléments apportés par le demandeur permettent d’apprécier la réalité d’une similitude de travail caractérisant une rupture d’égalité, la reclassification réclamée peut être obtenue.
  • La voie de la discrimination : le salarié peut obtenir un reclassement professionnel par invocation d’une discrimination. La caractérisation d’une discrimination permet au salarié d’obtenir, au titre des sanctions civiles, son reclassement dans la classification professionnelle qui aurait dû être la sienne.

3. Calculer le salaire minimum conventionnel

Une fois que le salaire minimum conventionnel est déterminé, il faut vérifier si le salaire que vous verse votre employeur respecte bien ce minimum.

Le premier élément à savoir est que la rémunération doit être supérieure au minimum conventionnel chaque mois. L'employeur ne peut pas prendre pour période de référence l'année entière par exemple.
Ensuite, une des principales difficultés que pose le respect du salaire minimum conventionnel réside dans la détermination de l'assiette prise en compte pour le calculer.

Quelles sommes doivent être intégrées dans son assiette pour vérifier concrètement si le montant du salaire versé au salarié est suffisant ?

Ce problème touche à la question des "compléments de rémunération".

Pour déterminer cette assiette, il faut d'abord vérifier que la Convention collective en question ne prévoit pas elle-même les éléments à prendre en compte dans l'assiette du salaire minimum conventionnel. Si c'est le cas, les juges sont tenus de suivre le texte conventionnel (Soc., 2 juillet 2008, 06-45987)

Ensuite, à défaut de stipulations conventionnelles prévoyant la composition de l'assiette, la Cour de cassation a précisé qu'un élément doit être intégré dans l'assiette lorsqu'il constitue la "contrepartie du travail" effectué. Dans la mesure où le même critère est utilisé pour le calcul de l'assiette du SMIC les solutions jurisprudentielles relatives au SMIC sont applicables au salaire minimum conventionnel.

Prenons deux exemples très concrets pour comprendre. 

Exemple n°1 : La prime de 13ème mois compte t-elle pour apprécier le respect du salaire minimum conventionnel?

La première chose à faire est de vérifier ce que prévoit la Convention collective.

À défaut de précision, il semble que la Cour de cassation juge qu'il faille prendre en compte le montant de la prime de 13ème mois pour apprécier le respect du salaire minimum conventionnel (Soc., 14 nov. 2018, n° 17-22.539)

Toutefois, le minimum conventionnel s'appréciant au mois, ce montant ne pourra être pris en compte que le mois au cours duquel la prime est versée.

Exemple n°2 : Les sommes versées au titre des heures supplémentaires sont-elles comprises dans l'assiette du salaire minimum conventionnel? 

La première étape est, encore une fois, de vérifier ce que prévoit la Convention collective.

À défaut de précisions, il semble qu'il faille retenir une durée hebdomadaire de 35 heures (Soc., 7 juin 2018, n° 16-23.468). 

On pourrait multiplier les hypothèses qui peuvent poser problème mais nous ne voulons pas alourdir inutilement cet article avec des dizaines d'exemples.

4. Que peut-on obtenir en cas de non-respect de salaire minimum conventionnel?

Il est possible de demander à son employeur un rappel de salaire, dans les limites de la prescription applicable, soit trois ans selon l'article L. 3245-1 du Code du travail, sauf si le non-respect du salaire minimum conventionnel résulte d'une discrimination (la prescription est alors de 5 ans).

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